« Vous l’avez fait ! », ont clamé les coordinateurs de cette action, Peter Cleiss pour le côté allemand, Jacques Schmitt pour le côté français.

Cette journée du 14 juin, ils l’avaient voulue festive avec les associations européennes (locales et transfrontalières, Jeunes Européens et Pulse of Europe) engagées dans ce combat depuis plus d’un mois : avec des musiques actuelles, des rappeurs soft venus de Freiburg et un jeune guitariste créateur d’un magnifique texte, « Welcome in Europe », qui méritera d’être traduit dans toutes les langues de l’Union européenne.

Hymne européen, version chantée, lâcher de colombes : tout y était, avec de surcroît les témoignages des citoyens qui avaient subi des contraintes frontalières confinant… au carcan du Rideau de fer ou aux voyages aventureux dans les Pays de l’Est avant 1989… Et Strasbourg a donné le « la » final à cette vague reliant d’un seul élan Schengen à Village-Neuf. Sur les rives de la Moselle, de la Sarre, de la Rosselle, de la Blies, de la Lauter et du Rhin, les associations avaient chacune agi localement, mais en coordination, en canoé-kayak, à vélo et surtout avec leurs grands balancements du parapluie, devenu le symbolique signal de l’amitié franco-allemande tous les dimanches de 12h à 12h 15.

Une telle épopée en forme de rendez-vous tenus et continus s’inscrira parmi les journées européennes citoyennes mémorables : car cet amical combat des Eurocitoyens-nes a été exemplaire. Le discours qui en ressort est très clair : « La crise sanitaire du Coronavirus appelait et requérait une solution européenne commune. Aucune crise globale dans l’avenir ne doit plus être traitée séparément par aucun État-nation. Pour protéger dans son ensemble, lors de crises aussi graves, la population de l’Union européenne, la stratégie est nécessairement européenne. En aucun cas un État ne peut revenir sur les droits conquis par les Eurocitoyens-nes pour se prétendre seul en mesure de fournir une réponse à une grande crise sociétale quelle qu’elle soit. Dont acte pour les gouvernements incapables de répondre aux enjeux d’une société européenne indivisible, formée d’Eurocitoyens-nes responsables. » L’union européenne n’est-elle pas née il y a juste soixante-dix ans d’une pareille prise de conscience et d’initiative communautaire face au danger mortel que courait l’Europe ?

Comme pour rattraper en l’actualisant cet anniversaire annulé par le confinement planétaire, le message du 14 juin 2020 est démocratique et dynamique, allant à l’encontre de toutes les tendances de populisme que les gouvernements soi-disant « vertueux » voudraient imposer à d’autres pays, sous prétexte qu’ils le seraient moins, pour prendre des décisions unilatérales. Car la santé et la lutte contre un virus ne connaissent pas de frontières, encore moins que tout autre domaine. Le sujet est vital, il est humain, il repose sur la valeur la plus forte de notre culture : le respect de l’autre, impliquant l’alliance pour l’assistance à notre prochain.

Dans ce contexte, combien absurde et dérisoire apparaît un cordon de barrières, de plots rouge et blanc, qu’on croirait sorti de vieilles ornières guerrières ! C’est brutal, insultant… intolérable pour des voisins qui, au-delà des lignes tracées par les États, vivent, travaillent et progressent ensemble. Ils entendent bien continuer à le faire toujours plus LIBRES !